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HISTOIRE DU CHÂTEAU DE JARNOSSE

VERS LA RENAISSANCE D'UN CHÂTEAU OUBLIÉ ENTRE FOREZ ET LYONNAIS

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Vue du bourg et du Château - Vers 1900 / 1910

D'après les étymologies ce nom est rattaché à deux radicaux:

Jar et Nos

L'un serait celtique: jar et signifierait "montagne".

L'autre serait latin: nos et signifierait "naissance".

Leur réunion formerait "Jarnosse".

Jarnosse a pour patron St-Pierre aux Liens. Son culte se répandit à la fin du 5 ième siècle. Avant l'ère chrétienne, les Ségusiaves occupaient tout pays Rhône et Loire (où se trouve Jarnosse), avec Forum Ségusiavorum (Feurs), avec Lugdunum (Lyon) Rodanno (Roanne), villes principales.

Puis il y eut un partage féodal en provinces: Jarnosse était limitrophe de 2 Provinces:

 

Un tiers pour le Beaujolais

Le reste pour le Lyonnais.

On croit savoir que toute la partie en deça du ruisseau appelé Montachelet (Le Jarnossin), avec sa réunion au Salencier au Moulin, faisait partie du Lyonnais (le Bourg, le château, Gilbeau, les Angles, Montpriest, chez Séve....

Le reste: maison léchère, la Montagne, une partie de la Rivière, faisait partie du Beaujolais.

Autrefois, Jarnosse était traversé par le Grand Chemin Français qui reliait Paris à Lyon, le royaume de France à l'Empire, car Lyon fut ville du Saint-Empire Romain Germanique jusqu'en 1307-1312 (Concile de Vienne). Ce chemin qui existe toujours, passait à La Montagne venant de Thizy et traversait le Jarnossin, au moulin, avant de filer vers Charlieu. Une variante devait aussi, sans doute, passer par le bourg. Ce fut une voie essentielle jusqu'à la guerre de Cent Ans. Elle fut empruntée, par exemple, par Eude Rigaud que le pape Innocent IV sacra archevêque de Rouen à Lyon en mars 1248.

LE CHÂTEAU DE JARNOSSE

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(extrait: "Les châteaux historiques du Roannais" par l'Abbé J. Prajoux - 1930)

 

Le château de Jarnosse est situé au sommet d’une colline ; les maisons et les jardins du village se déroulent à ses pieds, de telle sorte qu’il semble encore les couvrir de son ombre et de sa protection. Il a pour origine une ancienne maison forte flanquée de tours et en « bonne assiette pour la défense » selon un document de la fin du XVème siècle. On estime qu’il fut reconstruit au XVIème siècle par les seigneurs de la famille Gayant dont les armes « d’azur à quatre losanges, mis en losange d’argent » sont sculptées sur une pierre encastrée au-dessous de l’échauguette de la grosse tour qui existe encore. Au début du siècle suivant, en 1613, date plusieurs fois répétée sur les murs, il fut restauré. La précision de cette date en deux parties l’histoire de ce château. Au cours de la première, il fut possédé par les familles de Charlieu, de la Palud, Gayant, etc…, et pendant la seconde par les familles Austrein et du Sauzey.

 

Les premiers seigneurs de Jarnosse pourraient bien appartenir à une famille qui en portait le nom, car dans un différent survenu vers la fin du XVème entre l’abbaye de Saint-Chaffre du Monastier, les chanoines de Saint-Pierre de Mâcon et les bénédictins de Charlieu, au sujet de la possession de l’église de Jarnosse, les religieux de Charlieu réclament la propriété de cette église qui leur aurait été donnée par une charte concédée par les seigneurs de Jarnosse (au environ de 1082).

 

C’est sans doute à cette première famille seigneuriale de Jarnosse qu’il faut attribuer la chapelle du château fondée au début du règne de Saint-Louis, en 1248, et richement dotée par les fondateurs. L’époque de cette fondation et l’importance de la dotation font présumer qu’il s’agit d’une érection faite pour rappeler le souvenir d’une famille sur le point de s’éteindre ou d’un nom en voie de disparition.

 

Quoi qu’il en soit, le seigneurie de Jarnosse passa ensuite à la famille de Charlieu, qui tirait sans doute son nom de cette localité. A la fin du XIIIème et au cours du XIVème siècle, on trouve successivement comme seigneur de Jarnosse : Geoffroy de Charlieu, puis Louis de Charlieu et Jean, son fils (I). Celui-ci n’eut probablement que des filles, car vers 1400 Alix de Charlieu porte le titre de dame de Jarnosse.

 

Alix de Charlieu avait épousé Guy de la Palud, chevalier, seigneur de Châtillon-la-Palud, dans le département actuel de l’Ain, qui à partir de cette époque, agit au nom de sa femme. En conformité avec le droit féodal, leur fils aîné recueillit l’héritage paternel et se fixa dans les Dombes, mais leur second fils reçut en apanage les biens maternels situés au Beaujolais et fonda au XVème siècle la branche des la Palud de Jarnosse.

 

Jean de la Palud était seigneur de Jarnosse dans la seconde moitié du XVème siècle, il avait épousé Catherine de Vitré, fille d’André et Isabeau Raybe de Saint-Marcel. De ce mariage naquit un fils, Hugues de la Palud, qui fut chanoine comte de l’église de Lyon.

 

Les armes de la Palud étaient : « de gueules à la croix d’hermines ».

 

Vers cette époque, la seigneurie de Jarnosse fut partagée entre deux familles d’origines différentes, les de Thurin, possessionnés en Lyonnais, et les seigneurs de Chantemerle, établis au château de Vougy, en vertu d’une substitution (II) faite par Henry de Molles, seigneur de Vougy, du consentement de sa femme, Catherine de la Palud.

 

La famille de Thurin fut successivement représentée dans la seigneurie de Jarnosse par André de Thurin, marié en 1475, au temps de Louis XI à Bonne Faye d’Espeisses, qui, probablement, apporta à son mari la co-seigneurie de Jarnosse, puis par André II de Thurin, seigneur de Jarnosse et de Charly, marié à Jacquette du Crozet, dont François de Thurin, qui fut panetier de la reine-mère Catherine de Médicis. Il épousa Jeanne Faye, dont Philibert de Thurin, seigneur de Villerest, Bournay, la Gresle et co-seigneur de Jarnosse aux temps des guerres de religion et de la ligue, mort au début du règne de Louis XIII.

 

En ce qui concerne la famille de Chantemerle, on trouve parmi les seigneurs de Jarnosse Humbert de Chantemerle, qualifié seigneur de Jarnosse dans un acte du 12 août 1518, et peu de temps après on rencontre comme seigneur de Jarnosse Minerve de Ronchevol, qui, par mariage porta partie de cette co-seigneurie à François de Sainte-Colombe, dont les armes se voient encore dans le château actuel de Jarnosse.

 

Un peu plus tard, la co-seigneurie de Jarnosse est entre les mains de François Faye qualifié seigneur de Gatelier et Jarnosse marié en 1586 à Claudine d’Arcy.

 

Les armes des Faye sont «d’agent à la bande azur chargée de trois têtes de licornes d’or ».

 

Mais à cette époque déjà le château de Jarnosse avait été en partie reconstruit, notamment en dernier lieu par Philippe Gayant contemporain de Henri III, qui n’eut qu’une fille, Annonciade Gayant, mariée le 22 juin 1593 à Pierre Austrein, prévôt des marchands de Lyon, qui devint ainsi co-seigneur de Jarnosse.

 

Pierre Austrein, seigneur de Jarnosse en Lyonnais par suite de son mariage avec Annonciade Gayant, fit restaurer le château de Jarnosse et transformer son aménagement intérieur. Il eut de sa femme sept enfants, dont le second Henry Austrein, est qualifié seigneur de Jarnosse au temps de Louis XIII et au début du règne de Louis XIV.

 

Henry Austrein mourut à Jarnosse où il fut inhumé le 6 juin 1657. Par son testament daté du 26 octobre 1655, il léguait à l’hôpital du Rosnes, dont il avait été recteur, la somme de 300 livres, donnait l’usufruit de tous ses biens à sa femme et enfin instituait pour son héritier son neveu, Marc-Antoine de Sauzey, à la charge de porter la qualité de seigneur de Jarnosse et après son décès, l’un de ses enfants mâles « préférant toujours les mâles aux femelles en madite hoirie ». Le testateur exprimait le désir que son corps « soit inhumé au devant du grand autel, au costé de l’évangile, sous le marchepied de l’église paroissiale de Jarnosse » et fondait en rente de quatre livres, payable par les seigneurs de Jarnosse en faveur du sieur curé dudit lieu et de ses successeurs.

 

Par suite de ce testament, la seigneurie de Jarnosse passa à Marc-Antoine de Sauzey, fils de Claude, prévôt des marchands de Lyon et Catherine Gayant (1617).

 

Marc-Antoine du Sauzey, étant qualifié dans les actes du temps « Seigneur de Varennes, la Molière et Jarnosse, conseiller du roi en ses conseils, lieutenant particulier en la sénéchaussée et siège présidial de Lyon, conseiller au Parlement des Dombes et prévôt des marchands de la ville de Lyon ». Il avait épousé, le 10 avril 1644, Françoise Croppet, fille de Jean-Baptiste, lieutenant criminel de robe courte en la sénéchaussée et siège présidial de Lyon, et de Catherine Greffet.

 

Marc-Antoine du Sauzey résida à plusieurs reprises au château de Jarnosse comme en témoignent certains actes administratifs et judiciaires. Il mourut au début de janvier 1708, et fut inhumé non pas, comme on l’a écrit, dans la chapelle du château de Jarnosse, mais dans la chapelle que les seigneurs possédaient dans l’église paroissiale dudit lieu. Il laissait un fils, Dominique du Sauzey, qui un mois après la mort de son père, le 11 février 1708, épousa Marie Baret, dame de Celette, fille de François et Antoinette Prompsal. C’est dame Marie Baret, épouse de Dominique du Sauzey, qui le 1er septembre 1740, fit l’acquisition des terres de Rébé et d’Amplepuis, qui entrèrent ainsi dans la maison du Sauzey.

 

Dominque du Sauzey, qualifié « chevalier seigneur de Jarnosse, lieutenant de vaisseau, aide-major des armées navales de S.M. M. chevalier de Saint-Louis » était contemporain de Louis XV et ne fit à Jarnosse que de rares apparitions (IV). A sa mort, il laissa ses biens et ses titres a son fils, Jean-Baptiste du Sauzey, qualifié seigneur de Jarnosse au milieu du XVIIIème siècle.

 

Jean-Baptiste du Sauzey épousa, l8 janvier 1755, Marguerite de Blottefière, fille de Nicolas, marquis de Vauchelles. Vingt ans après son mariage, au début du règne de Louis XVI, il était qualifié « marquis du Sauzey, seigneur de Rébé, Amplepuis et Jarnosse, colonel, major des Gardes Françaises, gouverneur de Landrecies en Hainaut, Grand Croix de Saint-Louis, maréchal des camps et armées du roi ».

 

A la veille de la Révolution, le fief de Jarnosse en Lyonnais jouissait encore de tous les droits féodaux, comme il appert par les terriers renouvelés Destre, et de tous les droits de justice haute, moyenne et basse. Ces derniers droits remontaient à une haute antiquité, car au début du XIIIème siècle le prieur de Charlieu, et le seigneur de Jarnosse étaient seuls à jouir des droits de justice dans cette partie de la province de Lyonnais. Quelques seigneurs du voisinage avait la jouissance de ces droits, mais l’exercice en était limité à leur maison forte, voire même à une partie seulement de celle-ci.

 

Parmi les derniers officiers de justice de le seigneurie de Jarnosse, il faut citer Nicolas Destre, d’abord commis greffier, puis greffier, enfin vice-gérant en remplacement du juge Laurent Chabrier, procureur es-cours de Charlieu et Jarnosse, et Fleury Choulier, qualifié « avocat en parlement, juge, capitaine châtelain civil, criminel et de police de la châtellenie de Thizy et dépendances, faisant fonction de premier en ordre de la juridiction de Jarnosse en qualité de juge nommé et premier gradué ».

 

Jusqu’en 1790, la paroisse de Jarnosse fut divisée en deux parties dites du Lyonnais et du Beaujolais. La première était formée des cantons ou quartiers appelés : la Boury, la Tyssery, le bourg de Jarnosse, Montprié et les Angles. La partie beaujolaise des quartiers dits : la Fouilland, la Rivière et la Montagne.

 

En janvier 1790, l’assemblée Nationale ayant voté la suppression des anciennes provinces et la division de la France en départements, Jarnosse devint une commune du canton de Charlieu, district de Roanne, département de Rhône-et-Loire.

 

Ainsi finit cette singulière division d’une paroisse partagée entre deux provinces, division qui a jeté une certaine confusion dans l’énumération des seigneurs de Jarnosse aussi bien que dans les chroniques de cette ancienne maison.

 

Cependant, les premiers excès de la révolution effrayèrent Jean-Baptiste du Sauzey qui passa à l’étranger et en 1791, fut inscrit sur la liste des émigrés. Ses biens furent inventoriés et mis sous séquestre après que les scellés eussent été apposés sur les portes des appartements du château de Jarnosse. Deux brefs documents de cette époque font connaître ce qu’il advint des titres et documents enfermés dans la salle des archives et peuvent servir d’épilogue à cette esquisse historique du château de Jarnosse et de ses propriétaires : « Exposent les maire et officiers municipaux de la paroisse de Jarnosse disant qu’ils ont apposés les scellés du château de L’émigré Dusausey rière leur commune. Mais comme Loi du dix-neuf juillet dernier touchant le brûlement des titres féodaux leurs impose le devoir de procéder à ce brûlement, que dailleur il y sont invité par les citoyens de leur Commune. C’est pourquoi ils requièrent que le commissaire soit nommé et envoyé de votre part pour procéder à La levée des dits scellés pour faire le triement des titres afin de procéder de suite au désir de leurs concitoyens au brûlement de ceux concernant Les droits féodaux et de Noblesse.

« Deschavanne maire, Deschavanne officie, Badole office. »

 

Et au revers :

« Les administrateurs du Directoire du District de Roanne. Département de la Loire.

« Vu la pétition des Officiers Municipaux de la Commune de Jarnosse de l’autre part,

« Le procureur sindic ouï

« Autorisons les dits Officiers Municipaux à lever les scellés apposés dans la maison de l’émigré Dusauzay Rière leur territoire pour faire le triement des papiers de ce dernier, pour en soustraire les terriers et autres titres concernant les droits féodaux et de noblesse pour Iceux être brulées à la forme de la Loi et remettre les scellées.

« fait à Roanne, en Directoire le treize septembre 1793,

« l’an 2ème de la République Une et Indivisible.

 

« Dussud président, J. Poquillon vice-président,

« A.-M. Bergier Sup, Lagef, Lurat. »

 

 

***

 

 

 

De la maison forte de Jarnosse, propriété successive des familles de Charlieu, de la Palud, de Turin, Chantemerle, etc…, il ne subsiste plus rien aujourd’hui. Il en est autrement du château de Jarnosse, reconstruit et aménagé par les familles Gayant, de Sainte-Colombe, Austrein et du Sauzey. Il reste de ce manoir Renaissance une grosse tour ronde flanquée d’une échauguette au-dessous de laquelle s’épanouissent sur une pierre sculptée les armes de la famille Gayant et un corps de logis assez important sur lequel on rencontre la date de 1613, époque d’une restauration faite par la famille Austrein.

 

La grosse tour ronde, ornée d’une échauguette pour guetteur avec ouvertures en forme d’archières, est à peu près intacte ; mais le corps de logis à plus souffert. Sans doute il a conservé ses murs épais percés de trois fenêtres avec croisillons, mais il a perdu récemment sa haute toiture du XVIIème siècle qui lui gardait sa physionomie passée et permettait de faire surgir avec fidélité devant l’imagination la masse imposante de l’ancien château de Jarnosse flanqué de trois grosses tours qui dominaient tout le pays d’alentour.

 

 

***

 

 

Explications des mots :

 

(I) Jean de Charlieu était seigneur de Jarnosse lorsque les Tard-Venus ravageaient le pays (1363). Le 14 août 1368, il avoue tenir en fief et hommage-lige la maison dite de Barnay (Bernays, Bernayes,) située au mandement de Château-neuf, paroisse de Saint-Maurice-de-Lière, aujourd’hui Saint-Martin-de-Lixy.

 

(II) Cette substitution faite en faveur de Philippe de Chantemerle eut son plein effet en 1493, date de la mort de Henry de Molles. Philippe de Chantemerle, seigneur de Vougy au temps de Louis XII et de François 1er, avait pour armes : d’or à deux fasces de gueules, accompagnées de neuf merlettes du même, rangées en orle. Il donnait le dénombrement de Vougy, le 6 mars 1539.

 

(III) La famille Gayant possédait une partie de la seigneurie de Jarnosse dès le temps de François 1er. C’est un membre de cette famille qui fit construire dans la première moitié du XVI ème siècle la chapelle dite « des seigneurs » en l’église de Jarnosse. Cette chapelle, situé extra tectum, portait, en effet, les armes des Gayant sculptées à la clé de voûte, un caveau avait été aménagé sous la chapelle pour recevoir les restes des seigneurs de Jarnosse. Cette chapelle n’a été démolie qu’en 1895.

 

(IV) La seigneurie de Jarnosse était alors divisée en deux parties inégales, appartenant l’une à Dominique du Sauzey et l’autre au seigneur de la Varenne à Coutouvre. Le seigneur du Sauzey était qualifié « seigneur de Jarnosse en Lyonnais », et le sieur de la Varenne « seigneur de la Varenne et Jarnosse en Beaujolais ».

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